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1616-01-09.De Giovanni Paolo Villa da Brescia

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Molto reverendo padre maestro

Heri fu a Brescia fra Severino [che]2 sta di famiglia a Castiglione, che discorrendo meco delle cose di quel prencipe3 et padri gesuiti, mi raccontò tutte le sottoscritte cose che il giorno di San Diego4 andò quel prencipe a pranzo da’ padri zoccolanti, invitato dal cavallier Bellino5 , che ha fatto fare quell’altare et, discorrendo per sfogamento de suoi pensieri con il guardiano di detto loco et con fra Ludovico, gli mostrò alcuni consulti fatti da’ gesuiti, già che egli poteva impor gabelle, taglie et altro al suo populo et anco a’ religiosi secolari e regolari, a lui sogetti. Et adesso soggionse che si tratta di questa macina6 o scopeliatura7 , mi rispondono che non vogliono obedire se da suoi superiori non gli è commandato, ma credono che non gli commandaranno tal cosa.
Dopo mostrò lettere del padre Virgilio Ceppari8 che ha composta la Vita del beato Luiggi9 , fondato il collegio di gesuiti et delle vergini in Castiglione, il qual gli scrive di Roma che egli è come il re d’Ingilterra et la signoria di Venetia, onde sarà manco male partire di là perché ogni giorno saranno a querella, che così sarà contento sua eccellenza il vescovo di Brescia10 et la signoria di Venetia.
Il detto prencipe gli ha levata la cura delle vergini ove son tre sue nepoti11 et ha fatto stridar publicamente che niuno comperi biave da padri gesuiti per condurli fuori del suo Stato et similmente che niuno mandi i suoi figlioli a scola da gesuiti, pena a suoi, scudi 50; a forestieri, 25. La onde il primo dell’anno, festa del Gesù, non potero haver niun prete secolare né frate a far la musica, né a dir messe et non vi andò poco meno che niuno. Mi disse fra Severino che vi sono altre cose che sa quel fra Lodovico, suo cugino zoccolante, onde io l’ho pregato far sì che me ne ha datto conto per mandarlo poi alla Paternità Vostra.
Il padre socio12 le dirà le cose che occorrono, anco fra Lazzaro dell’illustrissimo nonzio13 , et per fine le baccio le mani.
Brescia lì 9 gennaio 1616

Di Vostra Signoria molto reverenda

Servitore
Provinciale di Venetia14

  • 1Cette lettre est amputée de l’adresse.
  • 2C’est nous qui ajoutons pour une plus grande lisibilité du texte.
  • 3Francesco Gonzaga (1577-23 octobre 1616) est le troisième marquis de Castiglione delle Stiviere. Il appartient à une branche cadette de la famille qui règne sur Mantoue : le premier marquis a été Ferrante (1544-1586) auquel aurait dû succéder son fils aîné Luigi (1568-1591) qui a renoncé à son fief pour entrer dans la Compagnie de Jésus ; c’est donc son frère Rodolfo (1569-1593) qui devient second marquis à la mort de son père. Rodolfo a régné par la terreur et la cruauté et il a finit par être assassiné, le 3 janvier 1593, laissant trois filles Cinzia, Olimpia et Gridonia. Le marquisat passe donc à son frère Francesco dont le gouvernement est contesté par la population qui se soulève en 1594, 1595 et 1596. Le 5 février 1598, à Prague, il épouse Bibiana von Pernstein (1578-17 février 1616), fille du grand-chancelier de Bohème, qui lui donne huit enfants. A partir de 1604, il est ambassadeur de l’empereur Rodolphe II à Rome et, pour remerciements de ses services, il est nommé prince de Castiglione en 1610.
    Au plan de sa politique religieuse, il soutient particulièrement l’ordre des capucins (une influence impériale ? ) pour lequel il fonde un couvent où il a demandé à être enterré. En juin 1608, il dote le collège féminin des Nobili vergini di Gesù d’une rente annuelle de 300 écus et des revenus de nombreuses terres. Le 5 juillet 1608, il dote les jésuites pour la construction d’une église, d’un couvent et d’un collège et il obtient de Rome la session de reliques de son frère, bienheureux Luigi Gonzaga, soit un tibia et le crâne. L’église paroissiale est érigée en collégiale avec dotation de 12 bénéfices (una bbé, un archi-prètre, six chanoines et 4 curés).
  • 4La fête de saint Diego d’Alcalà (1400-1463) OFM est célébrée le 12 novembre.
  • 5Ippolito Bellini est un noble originaire de Comacchio, connu pour avoir financé la dotation d’un canonicat de la collégiale de Castiglione et pour avoir légué à la ville un palais afin que l’on y installe la première bibliothèque publique, en 1620.
  • 6La macina est une taxe sur les moulins payées selon le nombre de tours nécessaires pour moudre les céréales ou autres produits comme les châtaignes. Cette taxe perçue par le meunier est généralement répercutée dans le prix de la farine et donc du pain.
  • 7Selon l’Institution du droit romain et du droit français, Paris, Guignard, 1686, p. 797, le scopélisme est un délit qui est tel que la plupart de ceux qui ont un ennemy ont accoutumé de scopeliser son champ, de mettre dans son champ un scopelisme c’est à dire d’y mettre des pierres qui sont une marque que si quelqu’un laboure ce champ, il perira d’une malheureuse mort par les embûches de celuy qui aura mis ce scopelisme et cela donne une telle frayeur que personne n’ose approcher de ce champ, apprehendant de mourir d’une mort cruelle; aussi les intendants ont accoûtumé de punir cette action tres-severement.
  • 8Virgilio Cepari (1563-1631) est un jésuite originaire de Rome, compagnon d’études de Luigi Gonzaga et très influent auprès de la famille Gonzaga. Confesseur de Cinzia, Olimpia et Gridonia Gonzaga, il les pousse à fonder le collège jésuite féminin dit les Nobili vergini di Gesù dans le palais de leur mère, Elena Aliprandi, le 21 juin 1608.
    Outre la Vita del venerabile Giovanni Berchmans fiammingo, religioso della Compagnia di Gesù et la Vita di santa Francesca Romana, fondatrice dell’oblate di Torre de’ Specchi, Cepari est l’auteur de la Vita del beato Luigi Gonzaga della Compagnia di Gesù … dal marchese Francesco dedicata alla santità di N.S. papa Paolo Quinto [Roma, Zannetti, 1606], il contribua à la construction du collège jésuite de Castiglione et de la basilique dédiée à saint Luigi Gonzaga, autorisée par Claudio Acquaviva, général des jésuites.
  • 9Luigi Gonzaga (1568-1591) est le fils aîné de Ferrante Gonzaga, marquis de Castiglione delle Stiviere. Il reçoit une éducation de jeune prince et devient page à la cour du roi Philippe II d’Espagne mais, très tôt, il est attiré par la vie religieuse. Le 2 novembre 1585, il renonce à ses droits héréditaires en faveur de son frère Rodolfo et entre au couvent jésuite de Sant’Andrea du Quirinal. Il prononce ses premiers vœux le 25 novembre 1587 et suit des études au collège romain sous la direction spirituelle de Roberto Bellarmino. En 1591, lors de l’épidémie de peste, il se consacre aux malades et est contaminé. Il meurt le 21 juin. La congrégation provinciale des jésuites, à Plaisance le 22 septembre 1603, invite le général Acquaviva à promouvoir sa béatification qui est proclamée le 12 mai 1604 par Francesco Gonzaga, évêque de Mantoue. Il sera canonisé en 1726.
  • 10La ville de Castiglione delle Stiviere ressortit au diocèse de Brescia, dont l’évêque est Marino Zorzi, du 4 mars 1596 au jour de sa mort, le 28 août 1631. Il a ses entrées au sein des familles vecchie de Venise et est peu estimé de Sarpi.
  • 11Les trois nièces du marquis sont Cinzia (1589-1649), Olimpia (1591-1645) et Gridonia (1592-1650), filles de Rodolfo Gonzaga et Elena Aliprandi (1573-1608) d’une richissime famille de banquiers de Pavie. Toutes les trois vont participer activement à la fondation du collège jésuite des Nobili vergini di Gesù dans le palais de leur mère, le 21 juin 1608, avec sept autres demoiselles : Rodomilla Tissomburga, Anna Vangini, Lelia Petrocini, Francesca Pastorio, Paola Carminati, Catterina Stagni, Anna Bellomi. Ce collège doit accueillir et éduquer religieusement les filles de bonnes familles, leurs dots (un minimum de 3581 lires) contribuant à l’entretien du collège; ces filles n’ont pas statut canonique de religieuses car elles ne prononcent que le vœu de chasteté et un serment d’obéissance à leur supérieure, nommée la prelata. La première prelata est Cinzia Gonzaga assistée de la ministra et de quatre consultrici, toutes élues par la communauté pour trois ans. A la mort de son oncle, le marquis Francesco Gonzaga, en 1616, Gridonia sera la tutrice de son très jeune cousin Luigi Gonzaga (1611-1636). Pour plus d’information sur l’histoire de la fondation de ce collège, voir Bartolomeo Arrighi, Storia di Castiglione delle Stiviere sotto il dominio dei Gonzaga, Mantova, Negretti, 1854, vol. I, § VI, p. 92-114.
  • 12Le socio del provinciale est une manière d’assistant, de vicaire du provincial : un vice-provincial.
  • 13Le nonce apostolique à Venise est alors Belingerio Gessi.
  • 14Giovanni Paolo Villa da Brescia (†1635) OSM a été consulteur du Saint-Office à Brescia, définiteur général de l’ordre, prieur provincial de Venise de 1615 à 1618 pendant le généralat de Baldassare Bolognetti da Bologna. Il est également membre de l’Académie des Eremiti, sous le nom de l’Avveduto.

Type scripteur
  • Autographe

Scripteur
  • Giovanni Paolo Villa da Brescia

Chiffrement
  • non chiffrée

Signature
  • Provinciale di Venezia

Lieu
  • Brescia

Source
  • ASV, Consultore in iure 453, f. 173r

Editions précédentes
  • Inédit